Les sociétés “médiévales” défient, de toute évidence, les classifications trop bien tranchées. Face à des schémas simplistes, imposés de toutes pièces par le désir d'abstraire ou le besoin d’offrir quelques lignes pédagogiques commodes, la réalité oppose l’existence bien concrète de groupes sociaux qui ne rassemblent pas forcément des hommes de mêmes conditions ou professions, de mêmes rangs, de mêmes fortunes. Tout au contraire. Les liens de voisinage, la dévotion au même culte et au saint patron, l’exercice de charités collectives, l’appartenance
surtout, de près ou de loin, à la même lignée familiale ou à sa clientèle, établissent et renforcent des solidarités qui pèsent très lourd sur tous les aspects de la vie politique ou sociale, dans les campagnes comme dans les grandes cités, à h l’intérieur ou en marge des rouages administratifs et des institutions en place. De la même
façon les cours “féodales ” ou “princières” ne se présentent pas seulement comme des organes de gouvernement, ni même comme des “hôtels” chargés de la gestion d'une maison: ce sont des milieux humains composites, aux structures fort complexes, unis cependant certaines solidarités, par un genre de vie très particulier, par la révérence à des signes extérieurs qui soulignent cette commune adhésion.
Fil: Heers, Jacques. Sorbonne; Francia.